Le 28 juin 2023, la Cramif organisait une journée dédiée à la prévention des risques professionnels dans le secteur sanitaire : de nombreux professionnels du secteur hospitalier et des cliniques franciliennes étaient réunis pour échanger ensemble sur les techniques de prévention en milieux de soins.
Stéphane Da Silva – Ingénieur-conseil, pilote secteur sanitaire et médico-social (SMS) – Cramif
Bonjour à tous. Bienvenue à ce deuxième rendez-vous sur la prévention des risques professionnels dans le secteur sanitaire et médico-social. C’est le deuxième rendez-vous, on avait fait un premier rendez-vous en 2020, donc là on enchaîne.
Vous êtes nombreux, donc on est quasi complet pour aujourd’hui.
On va commencer. Vous avez vu qu’on avait un programme assez dense, donc je vais laisser la parole à Monsieur Le Gouill, Directeur de l’Ensemble hospitalier de l’Institut Curie, ainsi qu’à Monsieur Blanchard pour l’introduction de cette grande journée.
Merci beaucoup.
Professeur Steven Le Gouill - Directeur de l’Ensemble hospitalier de l’Institut Curie
Bonjour à toutes et à tous. Merci d’avoir fait le choix de venir à l’Institut Curie pour cette journée sur la Prévention des risques professionnels. Je suis ravi de vous accueillir.
Comme vous savez, l’Institut Curie est l’ensemble hospitalier que j’ai l’honneur de diriger. Il a deux missions. La première, elle est d’abord évidemment de soigner des patients atteints de cancer qui nous font confiance et qui viennent sur l’un des trois sites de l’Institut Curie, celui de Paris, site historique, celui de Saint-Cloud et Orsay.
La deuxième mission, c’est de protéger nos collaborateurs. Et il est évident que nous ne remplirons pas la première mission si nous n’accomplissons pas la deuxième mission. Actuellement, le monde de la santé est un monde qui a vécu quelques bouleversements, pour le dire d’une manière légère ou pas trop alarmiste, et il est évident que cette deuxième mission prend de plus en plus de place.
À l’Institut Curie, depuis un an, nous avons rédigé et nous rédigeons notre projet d’institution sur huit axes, avec un projet médical bien évidemment. L’axe central du projet de l’ensemble de l’Institut Curie, c’est le volet social. Et ce n’est évidemment pas pour rien dans la conjoncture actuelle où nous avons voulu en premier lieu nous atteler à la tâche d’un projet social.
Dans ce projet, nous déployons notre feuille de route pour accompagner nos salariés, pour être plus attractifs, pour leur donner des perspectives d’évolution de carrière. Mais nous y traitons évidemment aussi des questions autour de la prévention du risque professionnel. C’est quelque chose qui se fait assez facilement à l’Institut Curie parce que cela fait complètement partie de la nature de l’institut qui comprend à la fois une partie hospitalière et une partie recherche ; et que nous manipulons au quotidien et tous les jours des produits dangereux, si nous n’y faisons pas attention, nous avons des sources de radioactivité. Donc tout ce qui touche la prévention est évidemment majeur à l’Institut Curie.
Mais il ne suffit pas de le dire, il faut aussi le décliner dans les faits ; et dans les faits, c’est-à-dire aussi dans des axes de financement.
L’amélioration des conditions de travail, c’est quasiment cinq millions d’euros d’investissement de l’Institut Curie. C’est la création d’un nouvel hôpital qui s’est ouvert il y a quatre semaines, à Saint-Cloud ; nous avons ouvert hier les consultations, nous avons encore juste la pharmacie à déménager. C’est un bâtiment moderne, un bâtiment aussi aux normes environnementales actuelles, et qui va radicalement changer les conditions de travail de nos employés.
C’est plus de 77 millions d’euros de la fondation investis dans la construction de ce bâtiment, avec au cœur, avoir un bâtiment facile pour travailler, recevoir des patients, accompagner les soignants dans leur vie. C’est 100 millions d’euros annuels, rien que pour la prévention des troubles musculosquelettiques.
Ces questions de santé au travail sont majeures. Et nous avons identifié plusieurs axes de travail à l’institut. Je l’ai dit, la réduction des troubles musculosquelettiques, la prévention des risques chimiques et biologiques, non seulement pour l’ensemble hospitalier, mais aussi pour le centre de recherche, la réduction des accidents de travail, la sécurisation et l’accompagnement de la construction du projet architectural. Parce que non seulement nous venons de terminer et nous prenons possession d’un nouveau bâtiment sur Saint-Cloud, mais comme nous aimons beaucoup la construction, nous commençons la construction d’un bâtiment nouveau, ici, Coursaget, qui donnera sur la Rue Gay-Lussac. Rien que la construction d’un tel bâtiment au cœur de Paris, comme vous pouvez l’imaginer, est en soi déjà un véritable défi, je dirais, administrativo-technique, mais ce nouveau bâtiment aussi sera un symbole de la qualité avec laquelle nous souhaitons recevoir et accompagner les patients et aussi nos collaborateurs.
C’est aussi les formations en termes de santé, sécurité, de nos propres salariés, puisque le premier niveau de sécurité, c’est aussi la formation des collaborateurs de l’Institut Curie.
Je dirais que ça, à l’institut, c’est notre présent, mais il nous faut aussi regarder les défis majeurs qui sont les défis, en tout cas pour le monde de la santé, mais au-delà du monde de la santé.
Cette accélération de nos sociétés, la mutation de nos sociétés, impacte aussi énormément les conditions de travail, ne serait-ce que par exemple par le télétravail, par les nouveaux outils numériques que nous employons, par le temps plus long passé assis, y compris pour des soignants. Tous ces défis-là, nous devons aussi les implémenter dans des structures qui elles par contre se doivent d’être de plus en plus souples, agiles, et capables de s’adapter à des changements rapides. Et évidemment, la crise Covid nous a montré à quel point il faut parfois s’adapter rapidement, parfois très bien, parfois plus difficilement ; et parfois il faut aussi revenir sur les changements et savoir ne pas tout garder et modifier cette prise en charge.
La Covid a été vraiment un élément majeur et révélateur de beaucoup de crises que l’on connaissait ou que l’on n’avait pas envie de voir, et qui sont venues dans un temps record nous obliger à repenser les conditions de travail. On pense en premier lieu évidemment au télétravail, mais aussi à tout l’impact qu’a eu le port de masque, le lavage des mains, revoir tous les circuits, développer des protections pour les gens qui accueillent les patients à l’entrée des hôpitaux.
Si nous espérons que ça ne reviendra jamais ou pas à ce niveau-là, il nous faut maintenant aussi anticiper ce type de crise, voire demain aussi des crises environnementales dans les conditions de travail. D’où aussi la construction, en ce qui nous concerne en tout cas de bâtiments à des normes environnementales les plus exigeantes, pour là aussi répondre à ce défi.
Donc vous avez devant vous une grande journée, vous avez devant vous beaucoup d’années de travail, de réflexion, tout comme on a une direction d’un hôpital comme celui de Curie ou d’une structure plus grande ou plus petite.
Juste après je vais vous laisser, je ne pourrais pas rester, je dois aller au Cse. Toutes ces discussions sont des discussions importantes avec les élus, et le fait que je sois présent à tous les Cse montre aussi une importance qu’attache la direction de l’ensemble hospitalier à ces questions. Avec ma directrice des ressources humaines, la directrice adjointe et moi-même, nous sommes très présents dans ces Cse parce que ces questions-là sont des questions majeures, parce qu’elles sont l’un des leviers d’attractivité et du maintien de nos collaborateurs à l’Institut Curie.
Donc je vous remercie d’avoir encore une fois choisi Curie pour réfléchir à toutes ces questions-là. Nous restons évidemment ouverts à des nouvelles propositions, nous sommes aussi force de proposition.
Merci à Monsieur Da Silva d’avoir organisé cette réunion, de l’avoir animée et encore une fois d’être dans nos murs pour discuter ces sujets majeurs.
Merci à vous tous.
Stéphane Da Silva
Merci Monsieur Le Gouill.
François Blanchard – Ingénieur-Conseil Régional – Cramif
François Blanchard – Ingénieur-Conseil Régional – Cramif
Mesdames et Messieurs, bonjour. Tout d’abord, je voudrais vous remercier, Professeur Le Gouill de nous accueillir ici dans ce magnifique lieu. La journée va être longue. Merci aussi à toutes les équipes qui sont derrière vous et qui organisent cette réunion, cette conférence. Merci aussi à vous toutes et tous qui êtes présents dans cette magnifique salle.
Dans le secteur sanitaire, la Cramif est surtout connue pour son action médico-sociale. Je vais reprendre quelques-unes des missions principales de la Cramif. Tout d’abord, nous avons une partie de gestion et de paiement des invalidités, pour toute la région Île-de-France, ainsi que pour des personnes habitant à l’étranger. Nous avons également pour une grande partie de la France, le paiement des allocations amiante, donc la possibilité pour les personnes qui ont travaillé au contact de l’amiante, de bénéficier de cette allocation avant de prendre leur retraite. Nous avons aussi en Île-de-France toute la gestion de l’appareillage, un appareillage qui peut être proposé pour les personnes siégées au niveau de la Cramif. Nous avons également, et c’est un service très important, la direction des affaires sanitaires et sociales, avec un ensemble d’environ 350 assistantes sociales qui sont auprès des assurés de la Sécurité sociale, qui travaillent dans les locaux de la Cpam, mais également dans des locaux des municipalités, des mairies, et également dans certains établissements de santé.
Nous avons un centre médical, le Centre médical Stalingrad, qui permet à une population de plusieurs arrondissements, qui est parfois éloignée des soins, de proposer une offre de soins très large, bien entendu en secteur 1. Ça permet effectivement à la population de ces arrondissements de bénéficier de ce service médical.
Et puis, nous avons toujours à Flandre, au Métro Stalingrad, un espace dédié de démonstration pour les personnes handicapées, donc pour tout le matériel qui peut être mis à disposition, aussi bien sur le lieu de travail qu’au domicile. Cet espace, c’est Escavie, il a également une antenne dans le 77, à Savigny-le-Temple.
Et puis, depuis deux ans, nous avons une mission handicap qui nous a été confiée par la Caisse nationale de l’Assurance Maladie, avec un point important ce mois-ci, le 7 juin, il y a eu le lancement de l’Initiative Régionale Handicap Santé qui était portée par la Cramif, avec l’association Handidactique et toute l’action qui est menée vers les personnes handicapées.
Au-delà de ces missions, la Cramif est l’acteur régional de la branche Risques professionnels de l’Assurance Maladie. C’est-à-dire que nous avons en charge la gestion du risque professionnel pour les entreprises, toutes les entreprises du régime général, qui commence par tout d’abord contribuer à la reconnaissance du caractère professionnel des accidents et des pathologies. Ensuite, une fois que les personnes sont prises en charge par leur Cpam, le calcul des taux de cotisation des entreprises, la tarification d’entreprise ; toutes les entreprises, les 500 000 entreprises d’Île-de-France ont un taux de cotisation calculé, donc les vôtres. Et nous avons enfin un service prévention qui intervient dans les entreprises, avec environ 120-130 ingénieurs-conseils contrôle sécurité qui interviennent au niveau des secteurs, plus des laboratoires, un laboratoire de mesure physique, un laboratoire de risque chimique, un laboratoire de biocontaminants. Ce sont des ressources importantes dont nous disposons.
Et avec ces équipes-là, nous avons également des équipes qui viennent faire de l’engineering prévention et qui proposent aussi des formations à l’ensemble des entreprises, des responsables d’entreprises, des salariés ou des représentants du personnel bien entendu.
Au-delà de cette action-là, de ce panorama, il faut savoir que notre action s’inscrit dans des programmes de prévention qui sont construits au niveau national et déclinés au niveau régional. Et nous avons également une particularité au niveau des régions.
Au niveau des actions nationales qui sont portées depuis plusieurs années, nous avons la prévention des troubles musculosquelettiques ; la prévention du risque chimique, qui était avant les cancérogènes mutagènes reprotoxiques, qu’on a élargie. Nous avons la prévention des chutes, on pense bien entendu aux chutes de hauteur dans les bâtiments, mais aussi toutes les chutes dans tous les établissements industriels ou des centres de santé, qui contribuent effectivement à des coûts élevés pour la Sécurité sociale et donc qui sont réinjectés dans le calcul des taux de cotisation.
Ces programmes-là sont génériques, mais dans les orientations futures, nous allons avoir une approche orientée vers le secteur sanitaire et médico-social. C’est-à-dire qu’il va y avoir, au-delà de la prévention des TMS et du risque chimique ou du risque de chutes, des spécificités qui vont être tournées vers le secteur sanitaire médico-social.
Nous travaillons de façon régulière avec l’Inrs, on a les représentants qui sont ici parmi nous. Et nous avons aussi un travail important avec les partenaires sociaux ; donc les partenaires sociaux représentants du collège employeur, représentants des salariés, avec les cinq syndicats salariés représentatifs. Et nous avons en Île-de-France des comités techniques régionaux, dont un comité technique régional spécifique dédié au secteur santé, avec des travaux importants qui sont réalisés avec les partenaires sociaux pour définir les bonnes pratiques dans certains domaines et qui peuvent être partagées avec les entreprises.
Cette particularité francilienne est unique en France, il n’y a pas d’autres régions qui ont des comités techniques régionaux dédiés au secteur de la santé. Et je tenais à vous en faire part.
Au-delà de ces interventions directes vers les entreprises, nous nous appuyons aussi sur des partenariats importants, tout d’abord avec les services de prévention et de santé au travail interentreprises, mais aussi autonomes. Donc ce sont les relations avec les services autonomes, c’est un petit peu différent parce qu’on passe directement par l’entreprise. On a bien entendu des relations avec l’Opca Santé, des relations avec la Drieets qui coordonne l’action des inspecteurs du travail ; mais au-delà de ça, il y a bien d’autres actions qui sont menées par la Drieets. Et puis, on a également des relations avec l’Ars dans le cadre du secteur sanitaire et médico-social, et puis l’Aract autour des conditions de travail.
Nous travaillons en partenariat avec ces différentes instances pour développer des synergies au bénéfice des entreprises et plus particulièrement des entreprises ou des établissements du secteur de la santé.
Vous venez de le dire, le secteur de la santé est en grande tension. Et de notre côté, nous pensons, malgré notre parcours plutôt technologique - puisque nous sommes soit des ingénieurs, soit des techniciens supérieurs – nous sommes convaincus que nous pouvons vous aider à améliorer les situations de travail les plus pénibles, les plus dangereuses. Et in fine, si vous arrivez à améliorer, à réduire le caractère de danger en situation de travail, ça réduira le nombre de jours d’arrêt de travail auxquels les salariés peuvent prétendre à un moment donné et réduire les coûts de cotisation que vous pouvez avoir au titre de la branche des accidents de travail et des risques professionnels. Et in fine, bien entendu, ça va jouer sur l’image qui est véhiculée par le secteur de la santé qui nécessite effectivement d’être montrée sous un angle beaucoup plus joyeux peut-être que ce qui a pu être vu parfois, notamment après la crise de la Covid.
Donc ce rendez-vous aujourd’hui est destiné à partager, à témoigner, entre vous, les professionnels du soin et de la prévention des risques professionnels. Je suis convaincu que ce sera très riche pour vous et que chacun d’entre vous repartira ce soir avec un ensemble d’actions à mener, qui sont peut-être simples ou peut-être au long cours sont complexes. Mais je suis convaincu que vous repartirez avec beaucoup d’idées en tête.
Donc la prévention pour nous est un bon investissement et nous sommes convaincus qu’on arrivera à vous convaincre.
Merci beaucoup.