L’Île-de-France est pilote d’une expérimentation sur la création de plateformes PDP départementales en partenariat avec plusieurs acteurs de l’Assurance Maladie, les services de prévention et de santé au travail et les acteurs de l’emploi. David Clair, directeur général de la Cramif parle de ce nouvel engagement du réseau Assurance Maladie.
Le réseau Assurance Maladie accorde une attention toute particulière à la prévention de la désinsertion professionnelle. Son objectif : favoriser le maintien en emploi des salariés qui rencontrent un problème de santé. Suite à un arrêt de travail de longue durée, certains salariés rencontrent des difficultés à reprendre leur activité. Il y a alors un risque de désinsertion professionnelle. Afin de les aider à conserver leur poste ou à accéder à un emploi compatible avec leur état de santé, il existe différents dispositifs de maintien en emploi.
Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste la PDP et quels en sont les intervenants ?
David Clair : La prévention de la désinsertion professionnelle est l’ensemble des démarches visant à permettre au salarié confronté à des difficultés en santé de se maintenir en emploi. Il s’agit d’une priorité des pouvoirs publics, ce phénomène touchant un nombre important de personnes en France :
- 160 000 avis d’inaptitude prononcés chaque année et souvent suivis de licenciements
- 15 % de salariés atteints d’une ou plusieurs affections de longue durée
- 2,3 millions de salariés en situation de handicap dont 0,9 million a fait l’objet d’une reconnaissance administrative du handicap.
Ces quelques chiffres permettent de se faire une idée du nombre extrêmement important de personnes qui, au cours de leur vie professionnelle, vont être fragilisées durablement par un problème de santé. La PDP vise à accompagner au mieux ces moments de fragilisation en permettant au salarié de reprendre le travail : celui qu’il occupait, à l’identique ou dans des conditions nouvelles, parfois d’évoluer sur d’autres postes, voire sur un tout nouveau projet professionnel.
Prévenir la PDP est un travail d’équipe. Une prévention efficace passe par la coordination de plusieurs catégories d’acteurs, dont les composantes de l’Assurance Maladie :
- le service médical
- le service social des caisses régionales
- les caisses primaires
- le service prévention des caisses régionales
- les Unions pour la gestion des établissements de caisses de l’Assurance Maladie (UGECAM)
Au-delà de l’Assurance Maladie, interviennent également :
- les services de prévention et de santé au travail (SPST), qui ont un rôle majeur dans le suivi des salariés des entreprises adhérentes et qui sont des acteurs essentiels de la PDP au sein de celles-ci.
- les acteurs de l’emploi, qui contribuent par la formation, des bilans de compétences et différentes actions au maintien en emploi.
Pourriez-vous revenir sur l’origine des plateformes PDP ?
David Clair : Dans le cadre des orientations de la COG* 2018-2022, la Caisse nationale de l’Assurance Maladie a constitué, fin 2018, une Mission nationale dédiée à la prévention de la désinsertion professionnelle, réunissant l’ensemble des directions concernées par le sujet. Un des axes principaux de travail figurant dans la note de recommandation transmise à la tutelle par la Mission, à l’été 2019, était la création de Plateformes départementales pluridisciplinaires de services proposant un accompagnement individuel aux assurés en arrêt de travail et en risque de désinsertion professionnelle.
Il ne s’agit pas de plateformes physiques mais d’une organisation innovante de circuits et de réseaux d’échanges qui facilite la coordination des acteurs. La Cramif assure par ailleurs le développement du système d’information qui y sera associé à terme. Début 2021, deux expérimentations ont été menées dans deux départements, le Jura et le Val-de-Marne.
Cette expérimentation a été suivie d’un déploiement sur l’ensemble des départements franciliens à partir du 1er juillet 2021.
*Convention d’objectifs et de gestion
Quelle en est la valeur ajoutée ? Comment vont- elles être déployées ?
David Clair : la valeur ajoutée de ce dispositif repose, d’une part, sur le repérage précoce du risque de désinsertion à travers des signalements de partenaires et l’exploitation d’une requête informatique par le service médical ; d’autre part, par la mise en place, au sein de l’Assurance Maladie, d’un coordonnateur de parcours qui se met au service de l’assuré et assure une fonction de coordination des acteurs autour des actions de remobilisation.
Concrètement, une requête informatique du service médical identifie les assurés dont la situation pourrait nécessiter une prise en charge par les plateformes. Cette requête s’appuie sur des critères tels que la durée de l’arrêt de travail, la nature de la pathologie, et d’autres informations connues du service médical. Dès lors le médecin-conseil et le conseiller service Assurance Maladie (CSAM du service médical) vont analyser la situation des assurés puis entrer en contact avec lui mais aussi prendre l’avis du médecin du travail. Selon l’analyse conjointe de la situation et si l’assuré en est d’accord, un « parcours PDP » est alors proposé. Un lien est effectué avec la caisse primaire qui vérifie les droits, ses IJ (indemnités journalières). Si la situation est complexe, ce qui est souvent le cas, le service social est sollicité en vue d’engager une démarche d’accompagnement global auprès de l’assuré.
Le parcours de remobilisation repose généralement, lorsqu’il se situe dans l’entreprise d’appartenance, sur une analyse et une action partagées avec le service de prévention et de santé au travail. Celui-ci intervient dans l’entreprise dans le cadre de sa mission, notamment par une action sur l’environnement de travail.
Quel est le calendrier de l’expérimentation ?
David Clair : nous sommes actuellement dans une phase de montée en charge tant en termes de nombre de départements concernés que de nombre de situations prises en charge. Courant 2022, il est prévu une évaluation interne du processus sur les premiers territoires et une mesure d’impact de l’offre sur une première cohorte composée des premières inclusions. La généralisation à l’ensemble du territoire et les ajustements éventuels interviendront au vu de ces résultats.
Quel service les employeurs et les assurés peuvent-ils contacter en cas de risque de prévention de désinsertion professionnelle identifié ?
David Clair : le service de prévention et de santé au travail reste l’acteur incontournable à contacter au sein de l’entreprise. Par ailleurs, l’assuré peut contacter le service social de sa caisse.
En résumé, cette expérimentation et son déploiement actuel ont 3 objectifs :
- réaliser une détection et une prise en charge précoce de l’assuré
- consolider la coordination des acteurs PDP autour de l’assuré
- mettre en œuvre un système d’information permettant un pilotage optimisé des situations PDP.