Lauréat 2024 des Trophées Cramif Handicap Santé. Cérémonie du 7 novembre 2024.
C’est quoi Signes de sens ?
Je suis le directeur de l'association Signes de sens, qui est une association qui travaille depuis un peu plus de 20 ans sur la transition inclusive de la société.
C'est-à-dire qu'on va à la fois aider les acteurs du spécialisé ou du droit commun à faire évoluer leur pratique, à faire évoluer leur compréhension de ce que c'est qu'une société inclusive, et puis ensuite on va mettre en place des processus de design inclusif. On va reconstruire avec les différents acteurs, les personnes concernées, les aidants, les professionnels, etc., des nouveaux services ou des nouveaux produits qui vont être plus inclusifs et qui vont permettre, quelque part, que tous les citoyens, peu importe s'ils ont un handicap ou pas, puissent profiter de ce que la cité offre au quotidien.
Notre prisme à nous, c'est que le handicap est un levier d'innovation, c'est-à-dire qu'à partir d'une problématique identifiée par une personne avec un handicap, on va mettre en place un processus de design inclusif qui va viser à construire une solution qui va bénéficier à tout le monde, peu importe qu'il y ait handicap ou pas.
En quelques mots, quelle est votre initiative et pourquoi l’avoir développée ?
Au tout départ, le projet est né, tout simplement, de sollicitations de parents d'enfants avec autisme qui avaient des difficultés sur les gestes du quotidien. Et notamment le brossage de dents, qui était hyper stratégique parce que quand vous avez une mauvaise hygiène dentaire, parce que c'est difficile d'apprendre à se laver les dents, vous avez derrière des douleurs dentaires, des caries, des besoins de soins. Et c'était des enfants qui avaient déjà énormément de difficultés à accéder aux soins, ce qui amplifiait le problème.
Ça finissait par amplifier les troubles du comportement parce que vous avez de la douleur, mais aussi, tout bêtement, parce que ce sont des enfants qui, parfois, se retrouvaient à 14 ans avec plus de dents, parce qu'au lieu de faire du soin, on enlevait les dents sous anesthésie générale. Il y avait vraiment une conséquence comme ça. Il faut avoir conscience que la santé dentaire, c'est un des principaux marqueurs sociaux. C'est à l'état de vos dents que je vais parfois vous identifier dans votre place sociale. Donc il y a plein de choses emboîtées en termes d'image de soi et d'image par la société de soi, au-delà des douleurs.
On a commencé à travailler sur cette question de comment apprendre à des tout-petits, avec des troubles autistiques, à se laver les dents. Et donc on a fait émerger le projet « Ben Le Koala » en travaillant avec le Centre ressources autisme du Nord-Pas-de-Calais, et puis un réseau d'acteurs, des familles, des structures médicosociales. Aujourd'hui, on se rend compte que l'enjeu, ce n'est plus seulement d'apprendre à l'enfant à se laver les dents, mais qu'on doit travailler avec tout l'écosystème autour de lui sur cette question de santé orale.
Grâce à Rhapsod'if (Réseau Handicap Prévention et soins odontologiques d’Île-de-France), ça nous permet de mieux comprendre les enjeux de l'écosystème. L'idée sur cette nouvelle étape, c'est de créer des ressources et une culture commune pour que tous ces acteurs travaillent mieux ensemble et de s'assurer qu'à la maison, on prépare bien la première visite chez le dentiste, que le dentiste, en cohérence avec ce que les parents ont fait, accueille l'enfant dans de bonnes conditions et comprend les besoins spécifiques.
Avec cette idée que, qu'un enfant ait un handicap, que ce soit l'autisme ou un autre, ou qu'il n'ait pas de handicap, ce soit juste une façon bienveillante d'accueillir un enfant dans une expérience complexe, celle du dentiste. On prolonge cette histoire d'apprendre à se laver les dents par l'accès aux soins dentaires.
Le soutien de la Cramif : comment va-t-il transformer votre projet et son impact ?
Le soutien de la Cramif, pour nous, il était important à deux niveaux. Le premier niveau, c'était institutionnel, c'est-à-dire que le projet soit reconnu par l'institution comme stratégique, important et pertinent. C'est une vraie clé pour un projet comme ça, de pouvoir aussi aller toquer aux portes des autres acteurs avec cette étiquette de la Cramif qui dit « Ce projet-là est intéressant et répond à nos standards et à notre exigence ».
Le deuxième, c'est la partie financière qui nous permet d'agréger les partenaires autour du projet, de créer un peu le tour de table, de s'assurer qu'on arrive à réunir les différentes parties prenantes, de commencer à bien travailler avec Rhapsod'if sur l'idée de ce déploiement et de cette perspective, et de travailler sur un premier support qui est le livret de santé orale qu'on donne aux enfants.
Ce livret, un peu comme un carnet de santé mais dédié à la santé orale, contient des conseils, des défis à réaliser, des étapes et des points clés, comme les premiers rendez-vous. Cela sert aux parents comme mémo de « Qu'est-ce que je ne dois pas oublier de faire ? », et à l'enfant pour se repérer sur sa santé orale et comment il prend soin de lui.